Diable de mer chilien

Mobula tarapacana | (Philippi, 1892)

N° 5755

Circumtropical

Clé d'identification

Raie pélagique de grande taille (envergure moyenne 2,5 m, maximum 3,7 m)
Face dorsale bleu foncé à vert-olive ou brune
Face ventrale blanche à l’avant et grise à l'arrière
Tête allongée portant des nageoires céphaliques courtes et pointues
Bouche sur la face ventrale
Pectorales triangulaires, étroites et falciformes pointant vers l'arrière
Queue fine dépourvue d’épine, plus courte que le disque

Noms

Autres noms communs français

Diable géant de Guinée, mante chilienne

Noms communs internationaux

Chilean devil ray, sicklefin devil ray, box ray, greater guinean mobula, spiny mobula (GB), Manta cornuda, diabolo gigante de Guinea, raya cornuda, vaquetilla (E)

Synonymes du nom scientifique actuel

Cephaloptera tarapacana Philippi, 1892
Mobula coilloti Cadenat & Rancurel, 1960
Mobula formosana Teng, 1962

Distribution géographique

Circumtropical

Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge], ● Caraïbes

Le diable de mer chilien évolue de façon éparse dans les eaux tropicales, subtropicales et tempérées de l'océan Atlantique et de l'Indo-Pacifique.

En Atlantique Ouest, il est signalé au large du Venezuela et du Brésil, notamment dans l'archipel de Saint-Pierre et Saint-Paul. En Atlantique Est, on le retrouve dans les eaux de la Côte d'Ivoire, de l'Afrique du Sud et du Cap-Vert, ainsi qu'aux Açores où des populations se rassemblent durant l'été autour de monts sous-marins tels que le banc de Princess Alice à Faïal ou le haut-fond d'Ambrósio à Santa Maria.

Dans l'océan Indien, sa présence est mentionnée dans le nord-ouest de la mer Rouge, en Inde, aux Maldives et en Indonésie.

Dans le Pacifique Ouest, on le trouve en Océanie, à Taïwan et au Japon. Dans le Pacifique Est, l'espèce est rencontrée depuis la Polynésie et Hawaï jusqu'aux côtes ouest-américaines, du Chili jusqu'au golfe de Californie où des regroupements sont observés durant les mois les plus chauds.

Biotope

Le diable de mer chilien évolue principalement en milieu océanique mais on peut aussi le rencontrer dans les eaux côtières. Il peut être observé seul ou en banc. Il s’agit d’une espèce capable de migrations importantes, pouvant se déplacer sur plus de 3800 km en 7 mois d’après certaines études. Il peut également effectuer des plongées à des profondeurs atteignant près de 2000 m (zone bathypélagique*), faisant de lui l'un des animaux océaniques le plus profond.

Description

Le diable de mer chilien est une raie pélagique* de grande taille, dont la largeur moyenne du disque est de 2,5 m et peut atteindre 3,7 m pour le plus grand spécimen répertorié. A la naissance, l'envergure atteint déjà 1 m environ.

Ce Mobulidé se caractérise par une tête allongée avec des nageoires (ou cornes) céphaliques* courtes et pointues. La bouche est située sur la face ventrale. La nageoire dorsale simple, petite et située très en arrière du corps, est de couleur unie. Les longues nageoires pectorales triangulaires relativement étroites et falciformes* pointent vers l'arrière. Le diable de mer chilien ne possède pas de nageoire caudale.

Chez l'adulte, la queue est plus courte que le disque et dépourvue d’épine à sa base. Sur la partie dorsale de l’animal, le tégument* présente une couleur allant du bleu foncé au vert-olive et au brun. La face ventrale est blanche à l’avant et grise à l'arrière, avec une ligne de démarcation irrégulière mais distincte. Les spiracles* en forme de fentes sont elliptiques et situés sous le bord du disque.

Espèces ressemblantes

Le genre Mobula regroupe actuellement les diables de mer et les raies manta. Outre M. tarapacana, il intègre 9 autres espèces ressemblantes.

Parmi ces espèces, on peut citer le diable de mer M. mobular. Chez cet autre diable, une pigmentation localement foncée en forme de barre est observable sur la nuque et la face ventrale est uniformément blanche, tandis qu'elle est grise à l'arrière chez le diable de mer chilien. La tête de M. mobular est plus courte que celle de M. tarapacana.

Chez M. eregoodootenkee, la face ventrale quasi uniformément blanche comporte une tache noire à l'avant des pectorales, tandis que chez M. kuhlii, une fine bande blanche borde la face dorsale de ces mêmes nageoires. Parmi les diables de mer, on peut enfin mentionner M. thusrstoni dont les pectorales présentent une légère inflexion à l'avant.

Une confusion est par ailleurs possible avec la manta géante M. birostris ou la manta des récifs M. alfredi, également dotées de marques ventrales grisâtres. Chez les mantas, la bouche est en position terminale de la tête et non ventrale comme chez les diables de mer. La couleur du dos est sombre, comportant des taches claires au niveau des épaules. Les cornes céphaliques* de ces dernières sont également plus longues que celles des diables de mer.

Alimentation

Tout comme les autres Mobulidés, le diable de mer chilien se nourrit de petits poissons et de crustacés planctoniques* après filtration par les plaques qui tapissent les fentes branchiales. Cette filtration se produit lorsque l’animal se déplace avec la bouche ouverte. Tout plancton* plus gros qu'un grain de sable est alors capturé par les plaques branchiales.

Reproduction - Multiplication

Le diable de mer chilien est une espèce ovovipare* (vivipare* aplacentaire*) : les embryons* se nourrissent initialement du jaune de l'œuf, puis reçoivent une alimentation supplémentaire par absorption indirecte de liquide utérin enrichi de mucus, graisse ou protéines.

D’une manière générale, les Mobulidés ont l'une des plus faibles productivités de tous les Chondrichtyens (poissons cartilagineux), avec une période de repos probable entre les grossesses allant de 1 à 3 ans. L'âge de la maturité sexuelle et la durée de vie maximale sont inconnus chez le diable de mer chilien. On peut néanmoins supposer qu’ils sont proches de ceux de M. mobular, qui atteint la maturité sexuelle entre 5 et 6 ans pour un âge maximum de 20 ans.

Vie associée

Comme les autres Mobulidés, les diables de mer sont très souvent accompagnés de rémoras (notamment Remorina albescens).

Divers biologie

Le diable de mer chilien est l’un des Mobulidés plongeant aux plus grandes profondeurs (jusqu’à 2 000 m), révélant un comportement de recherche de nourriture jusqu’à ces strates océaniques où les températures chutent à moins de 4°C. Un réseau de grandes et de petites artères permet d’éviter le refroidissement du cerveau pendant ces plongées profondes.

Les Mobulidés, continuellement en mouvement en eau libre, ne sont pas équipés de muscles branchiaux : le mouvement permanent des animaux permet la circulation d’eau oxygénée à travers la bouche et les branchies*. En cas d’immobilisation, circonstance rare en conditions naturelles mais possible lors d’un emmêlement dans des filets ou lignes de pêche, les animaux vont s’asphyxier et mourir rapidement.

Informations complémentaires

Mobula tarapacana est l’espèce de diable de mer la plus facile à approcher pour les plongeurs.

Le genre Manta a été récemment invalidé au profit du genre Mobula suite à des analyses ADN poussées. Les différences notoires qui justifiaient le genre Manta (position terminale de la bouche, absence de dents sur la mâchoire supérieure, queue beaucoup plus courte et dépourvue d'aiguillon) apparaissent désormais comme des caractères dérivés secondaires du genre Mobula.

Nous avons évoqué la famille des Mobulidés au travers de cette fiche, qui est celle actuellement adoptée par "Eschmeyer's Catalog of Fishes", la référence taxonomique mondiale pour les poissons. WoRMS (le site de référence de DORIS) classe quant à lui le genre Mobula dans la famille des Myliobatidés et la sous-famille des Mobulinés.

Statuts de conservation et réglementations diverses

Jusqu’à une période récente, les Mobulidés étaient relativement peu soumis à la pêche commerciale. Depuis quelques années, ils sont très recherchés pour leurs plaques branchiales utilisées pour la médecine traditionnelle en Asie, mais également pour leur viande, leur peau et leur cartilage. Ils sont par ailleurs victimes de la pêche ciblant d'autres espèces, telles que le thon et l'espadon.

La concomitance des captures accidentelles et intentionnelles a dévasté les populations de Mobulidés dans le monde entier. Les données disponibles montrent un effondrement des populations des diables de mer dans plusieurs régions, en particulier dans les zones d'agrégation, avec des déclins pouvant atteindre 50 à 99 % dans ces régions au cours des trois dernières générations (38 ans).

L'espèce a par conséquent été classée dans la catégorie ENdangered (en danger d'extinction) par l'UICN* lors de sa dernière évaluation en 2018. Pourtant, elle ne fait actuellement l'objet d'aucune protection.

Origine des noms

Origine du nom français

Diable de mer : nom donné par les pêcheurs du monde entier à ces animaux de grande taille en raison de leurs deux cornes sur la tête (on les appelle aussi localement raies cornues). Ces espèces sont ainsi mêlées à bien des légendes dans lesquelles, par exemple, des représentants entraînaient par le fond des bateaux dont ils avaient saisi l'ancre avec leurs cornes céphaliques*. En Polynésie, on raconte que ces diables venaient recouvrir de leur large "manteau" (d'où l'autre nom vernaculaire de mantes) les pêcheurs de perles et autres apnéistes pour les noyer. Ces vieilles croyances se reflètent ainsi dans le nom de diables de mer qui, dans les faits, sont totalement inoffensifs pour l'homme (la réciproque n'étant malheureusement pas vraie).

chilien : pays de la description du spécimen type.

Origine du nom scientifique

Mobula : probablement diminutif du mot "mobular", nom commun d'une raie aux Caraïbes.

tarapacana : provient du nom de la province chilienne de Tarapacà où le spécimen type a été décrit.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 105859

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Chordata Chordés Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés.
Sous-embranchement Vertebrata Vertébrés Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux.
Classe Elasmobranchii
Sous-classe Neoselachii Néoselaciens
Ordre Myliobatiformes Myliobatiformes Raies dont la dentition évoque une meule.
Famille Myliobatidae Myliobatidés
Genre Mobula
Espèce tarapacana

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